Interviews et conférences de presse
Les négociations ont une perspective lorsque les parties ont envie d’écouter l’une l’autre
L’entretien du Premier ministre par intérim de la RA Karen Karapetyan à la TV « Shant »
- Monsieur Karapetyan, vous n’êtes pas allé aujourd’hui aux négociations à l’invitation de Nikol Pahsinyan et vous les avez considérées comme sans perspective ayant en vue que le format et l’ordre du jour sont dictés d’une manière unilatérale. Dans quel cas, selon vous, les négociations auraient une perspective ?
Nous l’avons déjà commenté dans notre déclaration, et il n’y a pas de différence avec notre commentaire précédent, et je pense que la logique en est claire. Les négociations ont une perspective lorsque les parties ont envie d’écouter l’une l’autre. Après, c’est déjà un processus qui pourrait démontrer si les parties parviendront à un accord ou pas, seront flexibles en tant que négociateurs ou pas. Mais lorsqu’il est déclaré dès le départ qu’il y a un seul ordre du jour et que l’autre partie n’a pas le droit de former aucun ordre du jour, il ne s’agit plus de négociation, il s’agit je ne sais même pas de quoi.
- Il n’y a pas eu de négociations, il y a eu en revanche une conférence de presse en présence de quelques dizaines de médias durant laquelle Nikol Pashiniyan a noté que Karen Karapetyan n’était tout simplement pas sûr en matière de ses forces de négociateur, avec la citation suivante : « si la personne qui n’est sûr en matière de ses forces de négociateur à l’intérieure de son propre pays, comment pourrait-il mener des négociations, par exemple, sur le problème du Haut Karabakh ». Quel en serait votre commentaire ?
Tout d’abord, j’ignore si Nikol Pashinyan, en tant que négociateur, a une grande expérience ou pas, mais j’ai une intéressante expérience de négociateur, et cette expérience concerne les domaines culturel, religieux, substantiel et linguistique. Et jusqu’aujourd’hui, je n’ai pas eu de défaites dans des négociations. Etre un bon orateur, avoir une bonne notoriété, cela ne signifie pas forcément être un bon négociateur. C’est ce qui conditionne ma réponse.
- Hier soir, lors de la manifestation, Nikol Pashiniyan a noté que c’est lui qui serait Premier ministre et personne d’autre. Dans un autre cas il a noté que si ce n’est pas lui le Premier ministre, la crise va s’aggraver. Comment pourriez-vous commenter cela, et quelle solution voyez-vous indépendamment de la personne qui serait Premier ministre ?
Regardez, je tiens à ce que mes propos soient bien écoutés. Il est dit que lors des négociations il n’y a que mon ordre du jour, il n’y en a pas d’autres, que le seul Premier ministre c’est moi et personne d’autre etc… Nous parlons de la démocratie, du pluralisme d’opinions, de la nécessité d’écouter l’un l’autre, de la tolérance, de la Constitution, d’un pays parlementaire ; cela se ressemble à une monopolisation, à la monopolisation du terrain politique. Après, il est dit : je suis candidat au poste du Premier ministre. En réalité, j’ai un respect profond pour tous les citoyens qui expriment leur méfiance, leur désaccord, leur mécontentement, et que tout cela se déroule d’une manière pacifique, et j’espère que ça le restera. Nous devons mettre en place cette culture politique pour qu’on s’écoute mutuellement. Il y a des gens qui, ressemblés dans un même endroit, disent : notre Premier ministre est celui-ci. Il y a d’autres gens qui, ressemblés dans un autre endroit, disent : Premier ministre est cet autre ; alors, comment devrons-nous choisir celui qui serait Premier ministre ? C’est la raison pour laquelle qu’il y a une instance où le Premier ministre doit présenter son programme. Je crois que Monsieur Pashinyan a un programme expliquant – quel est le pays qu’il veut construire, quelles sont ses cibles en matière de la sécurité, des relations étrangères, de la croissance économique, des questions sociales, de la justice etc., mais c’est justement le programme que nous devons choisir. Nous ne choisissons pas une personnalité morale avec une bonne réputation, nous choisissons l’idéologie, et je n’exclue pas que les citoyens qui sont mécontents de la politique actuelle, veillent tous que ce soit lui le Premier ministre ; mais je n’exclue pas le contraire non plus. Il est possible que, si on leur donne à choisir parmi les personnes, les équipes, les programmes, même mécontents de la gouvernance actuelle, ils ne choisissent pas, je dis cela d’une manière conditionnelle, Monsieur Pashinyan. C’est pourquoi nous disons que la Constitution a réglementé tout cela, venez au parlement avec votre programme, et si vous en avez le vote, devenez Premier ministre. Mais cette manière de monopoliser, de dire c’est moi le seul Premier ministre, il n’y en a pas d’autres candidats, c’est moi seulement qui dicte l’ordre du jour, tu n’y as pas droit, je ne pense pas qu’on ait souhaité former une telle société.
- Et dernier point : On entend souvent ces derniers jours que les autorités ne seraient pas consolidées. A quel point vous partagez cette opinion ?
Qu’est-ce que cela signifierait – les autorités ne sont pas consolidées ? Si en disant des autroités on parle des institutions administratives, elles fonctionnent à leur rythme normal ; si on parle des partis politiques, ils sont consolidés.
- Comment voyez-vous cette consolidation, contrairement à ces opinions ?
Je ne sais pas vraiment quels sont les facteurs qui leur permettent de le dire.
- Parce que, avant ce mouvement, on n’en parlait pas.
Vous savez, il y a tellement de choses qui se disent : on parle de ma démission, je le démens, mais ça continue d’en parler. Si on dément tout ce qui est dit, on y passera des journées entières. Quant à la solution, je la vois de la manière suivante. En fait, nous avons une crise, nous avons des problèmes accumulés, et nous devons choisir clairement la force ou la coalition des forces qui puisse mener le pays vers un avenir meilleur. Quels sont les programmes ? Ce n’est pas la personne que nous devons choisir, mais le programme, la bonne équipe, nous devons avoir la capacité d’écouter l’un l’autre, nous devons faire preuve de tolérence. Nous ne le cachons pas, nous avons notre part de culpabilité qui est peut-être même grande, qu’il y a cette atmosphère d’intolérence, qu’il y a tellement de problèmes sociaux accumulés, mais nous devons sortir de cette situation, je ne sais pas, en parlant l’un à l’autre, en acceptant les erreurs, en éctoutant réciproquement les opinions. Il ne fait rien monopoliser, cela ne donnera rien de positif.