Discours et messages
Allocution de Monsieur Nikol Pashinyan, lors de la cérémonie nationale en hommage à Charles Aznavour
Monsieur le Président de la République française ,
Monsieur le Président de la République d’Armenie.
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les membres du corps diplomatique,
Chère Ulla Aznavour,
Chers membres de la famille Aznavour,
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes rassemblés aujourd’hui pour témoigner notre profond respect et pour rendre hommage au grand Maitre de la chanson française, Charles Aznavour. Ce nom, durant près de huit décennies, a dessiné un sourire sur des millions de visages, a accéléré ou ralenti la respiration à des dizaines de millions de gens, a fait briller les yeux des centaines de millions de personnes.
Et ce même nom, en ce premier octobre 2018, a soudain arrêté la course de la vie internationale et de la planète terre en marquant un chagrin inconsolable sur les visages des gens, en laissant une dernière affiche sur les une des journaux avec en titre : « à l’âge de 94 ans s’est éteint Charles Aznavour ».
Mais de quoi parlaient ces titres ? D’un désespoir ou d’une vanité ? Non, ces titres parlaient d’une grande victoire remportée par ce grand homme et par ses parents contre le destin.
Les ancêtres d’Aznavour, rescapés du génocide, ont erré dans le monde et ont trouvé refuge en France, comme des milliers d’autres Arméniens qui y avaient retrouvé l’espoir d’une nouvelle vie, et c’est là où est né Vaghinak Aznavour qui allait devenir plus tard le grand Charles Aznavour.
Il a traversé de rudes épreuves pour prouver sa vocation à laquelle il était le seul à croire. Tout le monde autour lui essayait de lui convaincre que la scène, ce n’est pas pour lui, de lui expliquer que chanter, ce n’est pas sa vocation, que le deston avait déjà été généreux à son égard en sauvant ses parents du génocide…
Mais Vaghinak Aznavour n’avait pas besoin de compréhension ou de compassion, il savait sa vocation, il connaissait sa mission, et cette mission qui était la sienne était celle de traverser tout ce chemin menant de Vaghinak Aznavour jusqu’à Charles Aznavour. Il a continué à écrire et à chanter, à chanter et à composer, dans des salles vides ou remplies à moitié, en donnant le temps au monde pour comprendre qu’une étoile nouvelle était né dans ciel de la culture mondiale, qui va faire « exploser » pendant des décennies les plus grandes salles de concert de l’inivers.
Et sa voix s’est répandue dans tous les coins du monde, en atteignant les cœurs même les plus froids.
Je n’ai malheureusement pas eu le temps de connaître personnellement Charles Aznavour, mais croyez – moi, je le perçois comme un proche parent. Et tout Arménien le perçoit comme un proche parent, car Aznavour est celui qui a porté le nom des Arméniens sur le toit du monde, qui a donné une nouvelle couleur et un nouvel élan a la fierté arménienne, qui a pu vivre les joies et les malheurs, les rêves et les aspirations de son peuple.
C’est aussi la raison pour laquelle Charles Aznavour a été déclaré héros national de la République d’Arménie : titre honorable largement mérité non seulement pour son talent de chansonnier, mais aussi pour les immenses services rendus à l’Arménie.
En Arménie, il y a plusieurs places et rues portant son nom ; et dans la deuxième ville d’Arménie, Gumri qu’il a tellement aidé après le tremblement de terre, il y a même un statut de Charles Aznavour faisant de lui un des personnalités exceptionnelles ayant un statut encore de leur vivant.
Le jour des obsèques de Charles Aznavour est décrété comme jour de deuil en Arménie, en signe de l’amour infini que chaque Arménienne et chaque Arménien porte en lui pour ce Grand Français, Grand Arménien et grand citoyen du monde.
Monsieur le Président de la République française,
Mesdames et Messieurs,
En ce jour solennel, je tiens à vous redire toute l’appréciation et toute la reconnaissance de mon peuple à l’égard de la France et du peuple ami français pour avoir accueilli à bras ouvert les enfants du peuple arménien, rescapés du génocide, pour être devenue la terre de sauvetage et de renaissance pour de tels talents arméniens, comme Charles Aznavour, Henri Verneuil, Georges Garvarents, Carzou, Jansem, et bien d’autres.
Aznavour était sans doute entièrement dévoué à la France, un grand citoyen de France, un Ambassadeur exceptionnel de la langue française, mais il étai aussi un ardent défenseur de l’Arménie, Ambassadeur vraiment extraordinaire de notre pays.
Les soucis de l’Arménie étaient le siens, et notre peuple a pu voir sentir tout son amour lors du tremblement de terre en Arménie, il y a trente en, ou encore pendant toutes les années difficiles de notre indépendance.
Charles Aznavour n’est pas resté indifférent lors de la révolution de velours survenue en Arménie, et dans le dernier courrier qu’il m’avait adressé, il écrivait, notamment : « Dès que ma santé me le permettra je souhaite vivement venir pour découvrir cette nouvelle Arménie et rencontrer les forces vives qui façonneront l’avenir de notre nation ».
Le grand Maitre s’apprêter à venir en Arménie la semaine prochaine, à l’occasion du 17ème sommet de la Francophonie, et je lui avais promis de lui présenter personnellement l’Arménie nouvelle, l’âme glorieuse et l’optimisme de ses citoyens.
Je n’ai malheureusement pas pu tenir ma promesse, et ma seule consolation est que le Maître a pu tout de même adresser son dernier souhait à l’Arménie actuelle dans son même courrier : « « Je souhaite de tout mon cœur que la jeunesse en Arménie puisse réaliser tout son potentiel et accomplir ses rêves en Arménie».
Cher Maître, cher Charles Aznavour,
Dans votre lettre, vous avez clairement précisé ce que veulent les Arméniens, ce que veut la jeunesse arménienne. Je fais une promesse aujourd’hui, ici, devant vous, Cher Maître, de me consacrer entièrement et de toutes mes forces aux valeurs universelles défendues par cette nouvelle Arménie, pour que la jeunesse puisse réaliser tout son potentiel et accomplir ses rêves en Arménie. Je vous le promets.
Restez en paix, Charles Aznavour, Grand Français, Grand Arménien, Grand Citoyen du monde ; restez en paix et dans la Lumière.